Tiburce Oger expose Buffalo Runner
À l’occasion de la sortie de “Buffalo Runner” (Rue de Sèvres), la Galerie Napoléon expose les planches originales de Tiburce Oger. Tantôt dessinateur, tantôt scénariste, il avoisine la quarantaine de parutions depuis plus de vingt ans, mais ce one-shot à ça de particulier qu’il endosse pour la première fois les deux rôles. L’éditeur lui a offert une carte blanche et Tiburce embrasse aussitôt le projet, il opte pour un western dont il signe le scénario, le dessin et, fait rare dans le monde de la BD, la mise en couleur.
Certes, il revient au far west, son thème de prédilection préalablement abordé il y a une dizaine d’années sur “La piste des ombres”, mais il s’éloigne ici de ses rêves de gamin et revient avec un regard plus adulte, plus sombre. Loin d’un hommage aux films du genre, il cherche à témoigner de l’état d’esprit d’un homme du dix-huitième siècle dans son monde contemporain, une vision désabusée de la conquête de l’ouest où se confrontent deux civilisations en quête d’un éventuel eldorado. Grosse pagination, Tiburce n’a pas été avare en détails, soucieux d’offrir une histoire complète, il nous sert un beau volume de soixante-seize planches, format raisin, couleurs directes où le texte est peu présent et l’image très bavarde.
On accompagne ainsi Ed Fisher, le personnage principal, qui va nous raconter sa vie en une nuit pleine de flashbacks, passant des traits creusés d’un jeune visage maigre au vieux faciès anoblie par une superbe moustache alourdie par le poids des années. Des plis du costume à la crinière des chevaux, tout est prétexte à laisser le mouvement s’emparer du trait, la gestuelle donne l’émotion et rythme la narration. Ces mêmes chevaux censés lui donner du fil à retordre mais que l’auteur a sublimé en quelques traits semi-réalistes parfaitement expressifs. Tous ces personnages évoluent dans un cadre désertique, hostile, le ton devient sombre, désenchanté. Alterné de pluies et d’éclaircies, le ciel joue un rôle important, Tiburce avoue d’ailleurs qu’il dessine et fait de la BD « pour trouver un prétexte à dessiner des ciels ». Il a en effet développé une recette personnelle pour créer des flous et dégradés proche de l’aquarelle qui donnent une profondeur à la composition en conservant une couleur soutenue. Le rendu est magnifique, son trait épuré apaise le dessin et ne garde que l’essentiel, la mise en couleur directe appuie la lumière et révèle l’ambiance western où dansent camaïeux et complémentaires dans de superbes teintes saturées.
Alors bravo à ces auteurs qui osent la mise en couleur directe, tellement plus expressives que les tons numériques souvent bien fades. Merci de nous offrir des originaux de cette qualité, respect Mr. Oger !
Stay in the bright mood !!
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